Susan Herbert. Photo : avec l’aimable autorisation de l’artiste/ Thames & Hudson.
« Le plus petit félin est un chef-d’œuvre », écrivait Léonard de Vinci, dont le dessin Étude des mouvements et positions du chat témoigne de son admiration pour la souplesse de l’animal ; les études de chats de Thomas Gainsborough et de Paul Gauguin étaient très similaires à celles de Léonard de Vinci.
Les chats ont proliféré dans l’art au cours des siècles. Ils sont devenus particulièrement populaires en tant que familiers câlins des femelles dans les peintures des artistes victoriens et des impressionnistes français.
Le chat peint par Edouard Manet sur les genoux de sa nièce Julie, âgée de huit ans (la fille de Berthe Morisot, elle-même future artiste) en 1887 est peut-être le plus content de l’histoire de l’art. Moins rassurant est le chat noir – symbole de la prostitution – perché au bout du lit de la femme nue dans Olympia de Manet, qui a scandalisé Paris lorsqu’il a été présenté au Salon de 1865.
Comme l’a observé le spécialiste de l’art et de la littérature Bram Dijkstra, les chats et la sexualité féminine sont devenus sinistrement symbiotiques dans une souche d’art misogyne fin de siècle suscitée par les peurs et les insuffisances des hommes. Le symbolisme à peine voilé des peintures de Charles J. Chaplin, Franz von Lembach, Hans Makart et d’autres déduisaient que les femmes étaient non seulement insatiables mais aussi enclines à la bestialité.
Comparativement bénins sont les chats de combat peints par Goya et John James Audubon, le Chat attrapant un oiseau de Picasso, le Fritz le chat en rut de Robert Crumb, et les sujets colorés du livre d’Andy Warhol imprimé à titre privé en 1954, 25 chats nommés Sam et une chatte bleue.
La liste qui suit n’est pas un Top 10 canonique des peintures de chats, mais un hommage à la diversité féline dans l’art.
Hieronymous Bosch, La Tentation de saint Antoine (panneau de droite) (vers 1501).
Dans le désert, un chat siffle sur la femme qui tente de tenter l’ermite Antoine, père du monachisme, avec son corps nu. Le poisson symbolise le christianisme, mais les oreilles démoniaques du chat le rendent ambigu.
Théodule-Augustin Ribot, Le cuisinier et le chat (années 1860).
Encore un poisson, encore un chat affamé. Le réaliste français Ribot s’est fait connaître en peignant d’humbles scènes de cuisine, dont celle-ci est la plus célèbre. Le cuisinier est-il inconscient de son ami à quatre pattes, ou ferme-t-il les yeux ?
Louis Wain, peintures de chats anthropomorphes.
Un artiste commercial londonien populaire obsédé par les chats, Wain a été définitivement hospitalisé pour maladie mentale en 1924. Le fait que ses peintures soient devenues de plus en plus hallucinatoires et abstraites a été attribué à une aggravation de la schizophrénie.
Jeff Koons, Cat on a Clothesline (1994-2001).
Inspiré par les cartes postales de chatons suspendus dans des chaussettes, Koons a sculpté son minou surdimensionné en polyéthylène pour sa série « Celebration ». Il était structuré comme une crucifixion pour combiner la spiritualité avec la joie préscolaire.
Arthur Rackham, By day she made herself into a cat (1920).
Cette « elle » malveillante est une sorcière changeant de forme qui transforme les vierges en oiseaux et les met en cage. L’illustration de Rackham pour « Jorinde et Joringel » dans Hansel et Gretel et autres contes des frères Grimm démontre son utilisation brillante de l’anthropomorphisme pour capturer des états d’esprit pathologiques.
Robert Gober, Sans titre (1989).
La sculpture métaphorique en colère de Gober se compose de deux sacs de litière pour chat et d’une robe de mariée vide debout dans une pièce décorée de papier peint. Ses motifs répétés sont un homme blanc endormi et un homme noir lynché. La litière signifie la tentative de l’Amérique de désodoriser une histoire fondée sur le racisme et le sophisme de la pureté hétérosexuelle blanche.
Carl Olof Larsson, Le Pont (1912).
Le point focal de l’aquarelle mystérieuse de l’artiste suédois est le petit chat souple qui contemple, comme sa maîtresse, le personnage masculin sur le pont. Un fil invisible relie le pelage noir du chat à la tête sombre de l’homme ; on s’attend à ce que le chat le tire, attirant l’attention de l’homme sur la femme qui s’était, peut-être, assise pour peindre le pont dans la solitude.
Georg Baselitz, Tête de chat (1966-67).
Le chat humanoïde brutal de Baselitz domine un chien plus petit, dont il est séparé par une clôture. Cette inversion typique du peintre figuratif expressionniste et postmoderne est à la fois un commentaire sur l’Allemagne post-nazie en ruine et les mouvements artistiques conflictuels au sein du pays divisé.
Kees von Dongen, Femme au chat (1908).
Ce tableau du fauviste néerlandais se distingue par sa juxtaposition de couleurs délicates, sa sérénité et son esprit. La position dans laquelle la femme tient tendrement le chat la rend presque androgyne. La courbe en arc de la queue du chat, son long corps et la coiffe de la femme harmonisent tous les éléments.
Pierre-Auguste Renoir, Fille et chat (1880-81).
La plupart des tableaux de Renoir mettant en scène des femmes et des félins sont couchés, comme ceux de Berthe Morisot et de Mary Cassatt. Celui-ci est le plus vital. Quelque chose dans les fleurs a fait se cabrer le chat, alertant légèrement la jeune fille sur sa posture érigée. L’équilibre entre indifférence et curiosité est parfaitement dosé.
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