Les composés ioniques ne sont pas inhabituels à être cassants
Votre hypothèse de départ selon laquelle les composés ioniques sont fréquemment cassants est trompeuse. Beaucoup, sinon la plupart, des solides sont cassants, qu’ils soient ioniques ou non.
Les raisons pour lesquelles les choses sont cassantes ont plus à voir avec la structure globale du matériau et moins avec la composition chimique du matériau.
Le sel de table est un composé ionique et est cassant. Mais le diamant est également cassant bien qu’il soit un solide moléculaire où toutes les liaisons carbone-carbone sont covalentes. Mais le fer forgé est solide et loin d’être cassant. Le cuivre pur est mou et malléable et non fragile. Le nylon et le kevlar sont à l’opposé de la fragilité.
La résistance est plus ou moins sans rapport avec le fait d’être fragile ou non et, définie correctement, est une mesure de la capacité à résister à la déformation. Mais cela n’a pratiquement aucun rapport avec la fragilité. Le verre est très solide mais, comme le sel, très cassant, ce qui explique pourquoi faire tomber son téléphone sur des surfaces dures est une mauvaise idée.
La ténacité est un meilleur terme pour désigner l’opposé de la fragilité. Les composés résistants peuvent se déformer sans se briser. Le nylon est faible mais résistant, le kevlar est fort mais résistant, le fer forgé est également fort et résistant. Mais la fonte est solide mais fragile, ce qui indique que la chimie globale ne fait pas tout.
Ce qui rend les composés solides, c’est la capacité à atténuer les contraintes externes dans la structure moléculaire du matériau. Dans de nombreux polymères, les liaisons des longues chaînes polymères peuvent tourner et se réarranger pour atténuer cette contrainte. Dans certains métaux (le fer forgé mais pas la fonte), la structure cristalline du métal contient des défauts qui peuvent se déplacer et se réorganiser pour atténuer les concentrations de contraintes. En revanche, le verre et le sel de table ne peuvent pas le faire et même de petites rayures superficielles concentrent les contraintes et s’étendent rapidement, entraînant l’éclatement du composé. Il leur manque un mécanisme moléculaire pour atténuer les concentrations de contraintes causées par les petites fissures. Ce problème peut être partiellement résolu par des traitements plus complexes de la surface du composé. Le verre « solide » (comme le verre Gorilla utilisé pour les écrans de téléphones portables) utilise un procédé qui traite le verre pour créer une tension à la surface. Cette tension minimise les concentrations de contraintes provenant de petites rayures superficielles et rend le verre résultant beaucoup plus résistant (ceci est parfois obtenu en ajoutant délibérément des ions à la surface du verre).
La dureté est un produit du matériau en vrac et non du type de liaison des molécules ou des atomes qui le composent.
En résumé, la fragilité n’est pas une propriété uniquement associée aux composés ioniques. La plupart des cristaux sont cassants. Les composés qui ne sont pas fragiles ne se distinguent pas par le type de liaison impliqué mais par des mécanismes complexes qui peuvent atténuer la concentration de la contrainte dans le composé en vrac. Ainsi, de nombreux cristaux covalents sont fragiles, et pas seulement les cristaux ioniques. Certains métaux sont fragiles, mais beaucoup ne le sont pas.