By Erico Guizzo

Posé le 2019-11-27 19:30 GMT

Un regard exclusif sur les robots les plus dynamiques du monde

Photo : Bob O’Connor
Gif : Bob O’Connor/IEEE Spectrum

Avec leur agilité à couper le souffle et leurs réflexes dignes d’un animal, les robots bioinspirés de Boston Dynamics ont toujours semblé n’avoir aucun égal. Mais cette prééminence n’a pas empêché la société de pousser sa technologie vers de nouveaux sommets, parfois littéralement. Sa dernière génération de machines à pattes peut monter et descendre des collines, franchir des obstacles et même sauter dans les airs comme un gymnaste. On ne peut nier leur attrait : Chaque fois que Boston Dynamics met en ligne une nouvelle vidéo sur YouTube, elle enregistre rapidement des millions de vues. Ce sont probablement les premiers robots que l’on peut qualifier de stars de l’Internet.

Boston Dynamics, autrefois détenu par Alphabet, la société mère de Google, et aujourd’hui par le conglomérat japonais SoftBank, a longtemps été secret sur ses conceptions. Peu de publications ont eu accès à son siège social de Waltham (Massachusetts), près de Boston. Mais un matin d’août dernier, IEEE Spectrum y a eu accès. Nous avons reçu la permission de faire une séance de photos d’un genre unique ce jour-là. Nous avons entrepris de capturer les robots de la société en action – courant, grimpant, sautant – en utilisant des caméras à haute vitesse couplées à de puissants stroboscopes. Le résultat que vous voyez sur cette page : des arrêts sur image de pure agilité robotique.

Nous avons également utilisé les photos pour créer des vues interactives, que vous pouvez explorer en ligne sur notre Guide des robots. Ces interactifs vous permettent de faire tourner les robots à 360 degrés, ou de les faire marcher et sauter sur votre écran.

Boston Dynamics a amassé un minizoo de bêtes robotiques au fil des ans, avec des noms comme BigDog, SandFlea, et WildCat. Lors de notre visite, nous nous sommes concentrés sur les deux machines les plus avancées que la société ait jamais construites : Spot, un quadrupède agile, et Atlas, un humanoïde de taille adulte.

Spot peut naviguer sur presque tous les types de terrain tout en détectant son environnement. Boston Dynamics l’a récemment mis à disposition pour la location, avec des plans pour fabriquer quelque chose comme un millier d’unités par an. La société envisage que Spot, ou même des paquets d’entre eux, inspectent des sites industriels, effectuent des missions liées aux matières dangereuses et livrent des colis. Et sa renommée sur YouTube n’est pas passée inaperçue : Même le divertissement est une possibilité, avec le Cirque du Soleil qui auditionne Spot en tant que nouveau membre potentiel de la troupe.

« C’est vraiment une étape importante pour nous de passer de robots qui travaillent dans le laboratoire à ceux qui sont endurcis pour travailler sur le terrain », déclare Marc Raibert, PDG de Boston Dynamics, dans une interview.

Notre autre sujet photographique, Atlas, est la plus grande célébrité de Boston Dynamics. Cet humanoïde de 150 centimètres de haut (4 pieds 11 pouces) est capable d’exploits athlétiques impressionnants. Ses actionneurs sont actionnés par un système hydraulique compact mais puissant que la société a conçu de toutes pièces. Ce système unique donne au robot de 80 kilos la force explosive nécessaire pour effectuer des sauts acrobatiques et des flips qui semblent impossibles à réaliser pour un humanoïde de cette taille. Atlas a inspiré une série de vidéos parodiques sur YouTube et plus d’une blague sur une prise de contrôle par les robots.

Si Boston Dynamics excelle dans la fabrication de robots, elle doit encore prouver qu’elle peut les vendre. Depuis sa fondation en 1992 en tant que spin-off du MIT, la société a été une opération centrée sur la R&D, avec la plupart de ses premiers financements provenant de programmes militaires américains. L’accent mis sur la commercialisation semble s’être intensifié après l’acquisition par SoftBank, en 2017. Le fondateur et PDG de SoftBank, Masayoshi Son, est connu pour aimer les robots – et les profits.

Le lancement de Spot est une étape importante pour Boston Dynamics, qui cherche à « productiser » ses créations. Pourtant, Raibert affirme que ses objectifs à long terme sont restés les mêmes : il veut construire des machines qui interagissent avec le monde de manière dynamique, comme le font les animaux et les humains. Est-ce que quelque chose a changé ? Oui, une chose, ajoute-t-il avec un sourire. Au début de sa carrière de roboticien, il écrivait des articles et comptait ses citations. Maintenant, il compte les vues sur YouTube.

  • À la une

    Photo : Bob O’Connor

    Boston Dynamics a conçu Spot comme une machine mobile polyvalente adaptée à une variété d’applications. La société n’a pas annoncé le prix de Spot, se contentant de dire qu’il est mis à la disposition de clients sélectionnés, qui pourront louer le robot. Une baie de chargement permet d’ajouter jusqu’à 14 kilogrammes de matériel supplémentaire à l’arrière du robot. L’un des accessoires que Boston Dynamics prévoit de proposer est un bras à 6 degrés de liberté, qui permettra à Spot de saisir des objets et d’ouvrir des portes.

  • Super Sens

    Photo : Bob O’Connor

    Le matériel de Spot est presque entièrement conçu sur mesure. Il comprend des cartes de traitement puissantes pour le contrôle ainsi que des modules de capteurs pour la perception. Les capteurs sont situés à l’avant, à l’arrière et sur les côtés du corps du robot. Chaque module se compose d’une paire de caméras stéréo, d’une caméra grand angle et d’un projecteur de texture, qui améliore la détection 3D en cas de faible luminosité. Les capteurs permettent au robot d’utiliser la méthode de navigation connue sous le nom de SLAM, ou localisation et cartographie simultanées, pour se déplacer de manière autonome.

  • Stepping Up

    Photo : Bob O’Connor

    En plus de ses comportements autonomes, Spot peut aussi être dirigé par un opérateur à distance avec une manette de type jeu. Mais même en mode manuel, le robot fait preuve d’un haut degré d’autonomie. S’il y a un obstacle devant lui, Spot le contournera. S’il y a des escaliers, Spot les montera. Le robot passe dans ces modes de fonctionnement et exécute ensuite les actions correspondantes de manière totalement autonome, sans aucune intervention de l’opérateur. Pour descendre un escalier, Spot marche à reculons, une approche qui, selon Boston Dynamics, offre une meilleure stabilité.

  • Funky Feet

    Gif : Bob O’Connor/IEEE Spectrum

    Les jambes de Spot sont alimentées par 12 moteurs à courant continu personnalisés, chacun étant démultiplié pour fournir un couple élevé. Le robot peut marcher en avant, sur le côté et en arrière, et trotter à une vitesse maximale de 1,6 mètre par seconde. Il peut également tourner sur place. Il peut également ramper et faire les cent pas. Dans une vidéo YouTube très populaire, Spot montre son jeu de jambes en dansant sur le tube pop « Uptown Funk ».

  • Robot Blood

    Photo : Bob O’Connor

    Atlas est alimenté par un système hydraulique composé de 28 actionneurs. Ces actionneurs sont essentiellement des cylindres remplis de fluide sous pression qui peuvent actionner un piston avec une grande force. Leur haute performance est due en partie à des servovalves personnalisées qui sont nettement plus petites et plus légères que les modèles aérospatiaux que Boston Dynamics avait utilisés dans les conceptions précédentes. Bien que non visibles de l’extérieur, les entrailles d’un Atlas sont remplies de ces actionneurs hydrauliques ainsi que des conduites de fluide qui les relient. Lorsqu’une de ces lignes se rompt, Atlas purge le fluide hydraulique, qui se trouve être rouge.

  • Next Generation

    Gif : Bob O’Connor/IEEE Spectrum

    La version actuelle d’Atlas est une mise à niveau approfondie du modèle original, qui a été construit pour le DARPA Robotics Challenge en 2015. Le tout nouveau robot est plus léger et plus agile. Boston Dynamics a utilisé des imprimantes 3D de qualité industrielle pour fabriquer des pièces structurelles clés, ce qui confère au robot un meilleur rapport résistance/poids que les modèles précédents. La nouvelle génération d’Atlas peut également faire quelque chose que son prédécesseur ne pouvait pas faire : Il peut se relever après une chute.

  • Walk This Way

    Photo : Bob O’Connor

    Pour contrôler Atlas, un opérateur assure la direction générale via un contrôleur manuel tandis que le robot utilise ses caméras stéréo et son lidar pour s’adapter aux changements de l’environnement. Atlas peut également effectuer certaines tâches de manière autonome. Par exemple, si vous ajoutez des étiquettes spéciales de type code-barres à des boîtes en carton, Atlas peut les ramasser et les empiler ou les placer sur des étagères.

  • Inspiré par la biologie

    Photos : Bob O’Connor

    Le logiciel de contrôle d’Atlas ne dit pas explicitement au robot comment bouger ses articulations, mais il emploie plutôt des modèles mathématiques de la physique sous-jacente du corps du robot et de la façon dont il interagit avec l’environnement. Atlas s’appuie sur l’ensemble de son corps pour s’équilibrer et se déplacer. Lorsqu’il saute par-dessus un obstacle ou qu’il effectue des acrobaties, le robot utilise non seulement ses jambes mais aussi le haut de son corps, en balançant ses bras pour se propulser comme le ferait un athlète.

Cet article est paru dans le numéro imprimé de décembre 2019 sous le titre « By Leaps and Bounds ».

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